Les premiers à entendre le Coran furent les habitants du désert d’Arabie, qui étaient très fiers de leur excellente maîtrise de la langue arabe. Ils n’étaient pas riches, mais leur langue était le domaine le plus développé de leur culture. Ils étaient, pour la plupart, commerçants et voyageaient régulièrement pour acheter et vendre des biens. Leurs longs voyages à travers le désert étaient, pour eux, de belles occasions de méditer sur les beautés de la nature. Lorsqu’ils s’exprimaient, ils étaient très méticuleux dans le choix de leurs mots et très précis dans leur discours. Ils adoraient l’art oratoire. Ils excellaient dans l’expression des pensées les plus complexes et exprimaient très clairement leurs idées. Composer de la prose et de la poésie était pour eux une passion. Ils rivalisaient en éloquence. Certains d’entre eux produisaient de la très belle littérature, même si les sujets choisis étaient pour la plupart insignifiants et profanes.
Ils gaspillaient leur talent à embellir le récit de leurs rendez-vous galants, de leurs exploits amoureux, de leur courage très exagéré sur le champ de bataille et des vertus de leurs vins et de leurs femmes. Leurs écrits étaient restreints en nombre, mais ils possédaient une mémoire prodigieuse et mémorisaient sans problème des milliers de citations, d’anecdotes et de poèmes. Leur littérature et leur poésie étaient donc le plus souvent transmises aux générations suivantes par tradition orale. Ils étaient si fiers de leur diction et de leur éloquence qu’ils s’étaient auto-proclamés les maîtres de la langue, tandis qu’ils considéraient les autres peuples comme étant privés de la faculté de langage; comparées à la leur, les autres langues ne servaient qu’à la communication. Ils faisaient référence aux non-Arabes en tant que « ajoums », i.e. ceux souffrant d’un défaut de langage.
Lorsque les Arabes entendirent le Coran pour la première fois, ils furent frappés d’admiration par son éloquence et écoutèrent, transis. Jamais auparavant n’avaient-ils entendu un discours aussi magnifique et bouleversant. Leur instinct leur dit qu’un discours aussi noble et impressionnant ne pouvait qu’avoir une origine divine et non humaine. C’était beaucoup plus sublime et solennel que toute leur littérature réunie. Le Coran leur confirma son origine divine et les mit au défi de composer une sourate, ou même un seul verset, dont le style et l’élégance seraient comparables. Dieu leur dit, à travers Son Livre, que tous échoueraient certainement à produire quelque chose de similaire, même s’ils joignaient tous leurs efforts pour ce faire.
« Et si vous êtes dans le doute au sujet de ce que Nous avons révélé à Notre serviteur (Mohammed), alors essayez donc de produire ne serait-ce qu’une sourate semblable, et appelez vos témoins, que vous adorez en dehors de Dieu, si vous êtes véridiques. » (Coran 2:23)
Les plus grands compositeurs d’Arabie furent mis au courant du défi, mais aucun ne réussit à le relever. Comparée au Coran, leur prose leur apparût comme maladroite et puérile. Ils se sentirent tout à coup comme des débutants inexpérimentés. Les orateurs les plus enthousiastes demeurèrent sans mot, remplis d’humilité devant les paroles du Coran. Les experts de la langue arabe ne purent trouver aucune faute ni défaut dans le langage du Coran. Ils se reconnurent incapables de s’y mesurer. Plusieurs étaient si fascinés, à la fois par la beauté de la langue et le message qu’elle transmettait, qu’ils embrassèrent l’islam sur-le-champ. Car lorsqu’on lit le Coran, dans sa langue originale, il apparaît très clairement qu’aucun homme n’aurait pu rédiger une telle œuvre.
Le Coran raconte l’histoire de l’homme, décrit toutes les étapes de sa vie (naissance, vie, mort, résurrection) jusqu’au jugement de ses actions et jusqu’à sa destination ultime – enfer ou paradis. Dans le monde physique où nous habitons, l’expérience de l’homme est restreinte à sa naissance, aux épreuves et aux tribulations de sa vie et à sa mort. Ses cinq sens ne lui permettent pas de percevoir une existence hors des confins de ce monde. Ses yeux ne peuvent voir de lumière émanant de l’autre monde et ses oreilles ne détectent aucun son provenant de ce lieu. Ses mains ne peuvent rien toucher, son nez ne peut rien sentir et sa langue ne peut rien goûter qui ne soit de ce monde-ci. Son esprit est donc incapable de percevoir la présence d’un autre monde, dans une autre dimension.
L’au-delà se situe donc de l’autre côté de la frontière de la mort. La résurrection, le jour du Jugement, le paradis et l’enfer, l’homme les retrouvera de ce côté. De manière poignante, claire et précise, le Coran décrit ces réalités en détail, en toute connaissance et avec assurance. Il parle des événements de l’au-delà aussi aisément qu’il parle des choses de ce monde. Depuis sa révélation, l’éloquence et la perfection linguistique du Coran demeurent inégalées, non seulement en arabe, mais dans toutes les langues du monde. Le défi est toujours ouvert. Mais nous savons que l’homme ne parviendra jamais à imiter la langue coranique.
La poésie doit son attrait et son éclat à son caractère fictif ou au caractère exagéré et amplifié des faits qu’elle présente. Le poète laisse aller son imagination et nous entraîne dans un monde sis en dehors de la réalité. Ou alors, il part d’une vérité pour la faire entrer dans un monde fantaisiste. Il joue avec les mots et son imagination est son terrain de jeu. Il se sert de figures de style pour rendre l’ordinaire extraordinaire, sensuel et sensationnel et les banalités du quotidien sont enrobées de rimes pour les rendre plus attrayantes. Le but du poète est de fasciner son lecteur et de le transporter dans un monde d’illusions et de fantaisies.
L’exagération est la spécialité du poète. Il étire la vérité à l’excès, jusqu’à ce qu’elle devienne parfois mensonge. Il transforme un événement banal en conte merveilleux. Si la vérité ne lui plaît pas, il la déguise ou la croise avec le mythe. Avec les mots, il fabrique un bouclier qui dévie les faits. Il déforme les mots jusqu’à ce qu’ils transmettent le sens qu’il désire leur donner. Il interprète la vérité à sa guise, jusqu’à ce que la vérité se transforme en étrangère. Il émet des mensonges en les enveloppant de faits connus et irréfutables. Il accorde respect et crédibilité à des suppositions sans fondement et défend ainsi le faux. La poésie est esthétiquement plaisante et stimule l’intellect, mais elle n’existe pas pour dire la vérité. Sur les poètes, le Coran dit :
« Et quant aux poètes, ce sont les égarés qui les suivent. Ne vois-tu pas qu’ils errent distraitement dans chaque vallée et qu’ils disent ce qu’ils ne font point? » (Coran 26: 224-226)
« Nous n’avons pas enseigné la poésie (à Mohammed), et cela ne saurait (d’ailleurs) lui convenir. Ce [Coran] n’est autre qu’un Rappel et une Lecture claire… » (Coran 36: 69)
« Mais non! Je jure par tout ce que vous voyez et tout ce que vous ne voyez pas que c’est là la parole d’un noble messager. Ce n’est point la parole d’un poète – mais vous ne croyez que très peu – ni la parole d’un devin – mais vous vous rappelez bien peu. C’est une révélation du Seigneur des mondes. »(Coran 69:38-43)
La différence entre le Coran et l’œuvre des poètes, des écrivains et des philosophes ne se situe pas seulement au niveau de la qualité, mais au niveau de la noblesse et de la dignité. Le Coran ne copie jamais le modèle littéraire terrestre. On pourrait plutôt dire qu’il a élevé comme jamais les normes de la littérature, qu’il a amenée à un nouveau sommet. Il a imposé des normes strictes et exigé l’exactitude des faits et une honnêteté absolue. Le Coran refuse d’épouser la fiction et l’exagération.
Les grands de la littérature connaissent les règles de grammaire et de diction. Et pourtant, ils n’arrivent pas à relever le défi du Coran. Ils en sont incapables parce qu’ils n’ont pas de vérités à dire, eux qui basent leurs écrits sur la fiction et le mensonge. Ils ne peuvent concevoir de rédiger un poème sans y ajouter quelques inventions de leur cru. Le Coran expose donc au grand jour la ruse des poètes et des écrivains. Sur les choses de ce monde, ils connaissent les faits, mais choisissent souvent de les contourner ou de les embellir, par malhonnêteté. Mais sur les choses de l’au-delà, ils ne peuvent que recourir aux devinettes et aux conjectures.
« La plupart d’entre eux ne suivent que des conjectures. Mais les conjectures ne servent à rien contre la vérité ! Certes, Dieu sait parfaitement ce qu’ils font. » (Coran 10: 36)
« Si tu obéis à la majorité des gens qui sont sur terre, ils auront tôt fait de t’égarer du sentier de Dieu. Ils ne font que suivre des conjectures et forger des mensonges. » (Coran 6: 116)
Le Coran a fait fi des normes de littérature reconnues, à l’époque, et a su faire preuve de grande éloquence et de distinction sans avoir recours à aucun type d’embellissement ou d’exagération. Pour cela, toute la littérature du monde, de toutes époques, de tous lieux et de toutes langues se classe nécessairement à un niveau moins élevé que le Coran. Le Coran possède son propre style, son propre caractère. Il établit clairement les faits et adhère méticuleusement à la vérité. Même lorsqu’il mentionne une parabole, la comparaison ne vise jamais à déformer la vérité. La précision est sa priorité et tout son contenu peut être cru les yeux fermés, sans qu’aucun doute ne subsiste. Ce souci de vérité et d’exactitude des faits inspire la confiance à ses lecteurs et raffermit la foi des croyants. Ils savent donc que les versets relatifs à l’au-delà sont tout aussi vrais et non exagérés. La raison pour laquelle le Coran est demeuré unique et sans égal, tant au niveau de son style qu’au niveau de son contenu, c’est qu’il contient la vérité absolue. Il dit d’ailleurs :
« Voilà les versets de Dieu, que Nous te récitons, (ô Mohammed), en toute vérité. Et tu es, certes, (l’un) de Nos messagers. » (Coran 2:252)
« Il t’a révélé, (ô Mohammed), le Livre avec la vérité, confirmant [les Écritures] qui avaient été (révélées) avant lui. » (Coran 3:3)
« Alif. Lam. Mim. Ra. Voici les versets du Livre. Ce qui t’est révélé par ton Seigneur est la vérité ; mais la plupart des gens ne croient pas. » (Coran 13:1)
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